Faits du dehors

Les luttes intérieures ne doivent pas nous faire oublier les faits du dehors.- Les frontières sont des portes sur lesquelles nous devons sans cesse avoir les yeux. La République française nous avait habitués à je se sais quelle hésitation inexplicable et singulière sur la politique suivie par la démocratie. Le mirage d'un passé brillant semblait la séduire, elle était en contradiction formelle avec le génie moderne L'ambition de faire grand ne vaut pas celle de faire bien. La République française s'abusait.

L'organe du leader des gauches a compris que ces conceptions démodées étaient chimériques ; elle paipe aujourd'hui avec un réel bon sens, elle s'applique cette fois à défendre une politique plus approfondie,

plus nette, plus en harmonie avec les conditio actuelles de la société française.

Les peuples étrangers peuvent feindre de croire à un danger : toute nouveauté effrayé. Ils peuvent, trompés par certains rapports, égarés par de faux rapprochements historiques, nous croire ni changés, ni guéris de notre amour des bouleversements : c'est une erreur indéracinable et naturelle chez des nations sur lesquelles nous sommes en avance depuis plus d'un demi-siècle.

L'Europe reste surprise devant ce spectacle d'un peuple maître de lui-même, maître de ses destinées, assez fort pour résister aux compétitions, proclamant l'égalité des citoyens, supprimant les classes et les castes, déracinant les vieux préjugés sociaux et brisant sans coup férir, par la seule force de scrutin, les obstacles qui s'opposeraient à sa marche sûre, hardie, mais prudente.

La République n'est pas la fille du hasard, sortie d'une révolution et qu'une révolution peut renverser. C'est le résultat de la force des choses : c'est la constitution de la France, constitution conforme aux besoins et aux désirs de la nation, c'est la stabilité assurée. La foule va à la République. Chaque vote nouveau l'affirme. Ce n'est pas un caprice, c'est une nécessité. Les assises de la démocratie sont posées, et les incertitudes qui pesaient sur nos gouvernements depuis les grands jours, n'existent plus. Nos voisins, n'ont pas encore eu leur nuit du 4 août : ils ne peuvent nous comprendre.

Cette transformation intérieure semble parfois alarmer l'Europe monarchique : elle voit un péril dans ce peuple libre, secouant en plein ciel son étendard indépendant. Nos rapports avec les puissances ont cessé d'être les mêmes. Il ne faut point se faire illusion sur nos relations extérieures : la France incomprise met mal à l'aise la vieille Europe.

Cette crainte nous fait pitié. Les journaux officiels et officieux d'au delà les Pyrénées ou le Rhin ou les Alpes croient à des retours vers les idées de conquête : le moindre discours patriotique est prétexté à clameurs amères. Et un Français ne peut

plus crier : Vive la France, sans qu'aussitôt les organes de nos voisins ne prophétisent l'entrée en campagne de quelque nouveau conquérant, tenant en main le glaive de la République française. C'est méconnaître la marche de nos idées ; notre métamorphose pour être prodigieuse ne devrait ce nous semble, cependant, moins les étonner.

Le chauvinisme aveugle est mort en France. La politique d'aventures est condamnée ; nous avons abandonné le rôle agressif qui nous valut quelques succès jadis, mais qui aujourd'hui n'a plus de sens ; nous portons nos regards plus loin. Notre ambition est plus saine. Nous ne gagnerons rien à d'inutiles conquêtes, ni a de vaines augmentations de territoire. Les brillants faits d'armes n'ajoutent rien à la fortune nationale et ils créent des héros militaires : héros dangereux et funestes pour les Républiques.

Puisque nos voisins veulent méconnaître le sens de notre réforme, rassurons-les par des actes; que notre politique extérieure n'emprunte rien à l'aventure. Un gouvernement résolument républicain doit être résolument pacifique. On disait, et la République française la première : que notre amour de la paix avait abaissé les coeurs. Non ; nous avons toujours et plus que jamais le culte de la patrie ; mais nous ne voulons pas continuer les errements des anciens régimes. Il ne sera plus besoin du canon pour nous faire respecter du dehors. On ne fait d'affronts qu'aux faibles. Et la France est une nation forte étant une nation riche. Il ne faut pas que l'Europe nous craigne : il faut qu'elle nous admire.

Nous sommes d'accord avec la République française, quand elle dit que notre rôle est d'initier l' Occident à la révolution démocratique, vers laquelle, du reste, il va irrésistiblement. Notre ambition n'est pas de jeter le lourd glaive de Brennus dans la balance européenne. Nous assisterons aux conseils de l'Europe, comme les représentants du droit. Soucieux des scrupules de chacun, et tout en demeurant fidèles à notre démocratie, respectueux de leurs traditions monarchiques. Nous ne devons pas éveiller des craintes,ni froisser des susceptibilités.

Modérée au dehors, sagement résolue et prospère au dedans, telle devra être la politique suivie par la République française.

GEORGES LETELLIER.

Contenu textuel de l'image : Faits du dehors
Contenu textuel de l'image : Les luttes intérieures ne doivent pas nous faire oublier les faits du dehors.- Les frontières sont des portes sur lesquelles nous devons sans cesse avoir les yeux. La République française nous avait habitués à je se sais quelle hésitation inexplicable et singulière sur la politique suivie par la démocratie. Le mirage d'un passé brillant semblait la séduire, elle était en contradiction formelle avec le génie moderne L'ambition de faire grand ne vaut pas celle de faire bien. La République française s'abusait.
Contenu textuel de l'image : L'organe  du leader des gauches a compris que ces conceptions démodées étaient chimériques ; elle paipe aujourd'hui avec un réel bon sens, elle s'applique cette fois à défendre une politique plus approfondie,
Contenu textuel de l'image : plus nette, plus en harmonie avec les conditio  actuelles de la société française.
Contenu textuel de l'image : Les peuples étrangers peuvent feindre de croire à un danger : toute nouveauté effrayé. Ils peuvent, trompés par certains  rapports, égarés par de faux rapprochements historiques, nous croire ni changés, ni guéris de notre amour des bouleversements : c'est une erreur indéracinable et naturelle chez des nations sur lesquelles nous sommes en avance depuis plus d'un demi-siècle.
Contenu textuel de l'image : L'Europe reste surprise devant ce spectacle d'un peuple maître de lui-même, maître de ses destinées, assez fort pour résister  aux compétitions, proclamant l'égalité des citoyens, supprimant les classes et les castes, déracinant les vieux préjugés sociaux et brisant sans coup férir, par la seule force de scrutin, les obstacles qui s'opposeraient à sa marche sûre, hardie, mais prudente.
Contenu textuel de l'image : La République n'est pas la fille du hasard, sortie d'une révolution et qu'une révolution peut renverser. C'est le résultat de la force des choses : c'est la constitution de la France, constitution conforme aux besoins et aux désirs de la nation, c'est la stabilité assurée. La foule va à la République. Chaque vote nouveau l'affirme. Ce n'est pas un caprice, c'est une nécessité. Les assises de la démocratie sont posées, et les incertitudes qui pesaient sur nos gouvernements depuis les grands jours, n'existent plus. Nos voisins, n'ont pas encore eu leur nuit du 4 août : ils ne peuvent nous comprendre.
Contenu textuel de l'image : Cette transformation intérieure semble parfois alarmer l'Europe monarchique : elle voit un péril dans ce peuple libre, secouant en plein ciel son étendard indépendant. Nos rapports avec les puissances ont cessé d'être les mêmes. Il ne faut point se faire illusion sur nos relations extérieures : la France incomprise met mal à l'aise la vieille Europe.
Contenu textuel de l'image : Cette crainte nous fait pitié. Les journaux officiels et officieux d'au delà les Pyrénées ou le Rhin ou les Alpes croient à des retours vers les idées de conquête : le moindre discours patriotique est prétexté à clameurs amères. Et un Français ne peut
Contenu textuel de l'image : plus crier : Vive la France, sans qu'aussitôt les organes de nos voisins ne prophétisent l'entrée en campagne de quelque nouveau conquérant, tenant en main le glaive de la République française. C'est méconnaître la marche de nos idées ; notre métamorphose pour être prodigieuse ne devrait ce nous semble, cependant, moins les étonner.
Contenu textuel de l'image : Le chauvinisme aveugle est mort en France. La politique d'aventures est condamnée ; nous avons abandonné le rôle agressif qui nous valut quelques succès jadis, mais qui aujourd'hui n'a plus de sens ; nous portons nos regards plus loin. Notre ambition est plus saine. Nous ne gagnerons rien à d'inutiles conquêtes, ni a de vaines augmentations de territoire. Les brillants faits d'armes n'ajoutent rien à la fortune nationale et ils créent des héros militaires : héros dangereux et funestes pour les Républiques.
Contenu textuel de l'image : Puisque nos voisins veulent méconnaître le sens de notre réforme, rassurons-les par des actes; que notre politique extérieure n'emprunte rien à l'aventure. Un gouvernement résolument républicain doit être résolument pacifique. On disait, et la République française la première : que notre amour de la paix avait abaissé les coeurs. Non ; nous avons toujours et plus que jamais le culte de la patrie ; mais nous ne voulons pas continuer les errements des anciens régimes. Il ne sera plus besoin du canon pour nous faire respecter du dehors.  On ne fait d'affronts qu'aux faibles. Et la France est une nation forte étant une nation riche. Il ne faut pas que l'Europe nous craigne : il faut qu'elle nous admire.
Contenu textuel de l'image : Nous sommes d'accord avec la République française, quand elle dit que notre rôle est d'initier l' Occident à la révolution démocratique, vers laquelle,   du reste, il va irrésistiblement. Notre ambition n'est pas de jeter le lourd glaive de Brennus dans la balance européenne. Nous assisterons aux conseils de l'Europe, comme les représentants du droit. Soucieux des scrupules de chacun, et tout en demeurant fidèles à notre démocratie, respectueux de leurs traditions monarchiques. Nous ne devons pas éveiller des craintes,ni froisser des susceptibilités.
Contenu textuel de l'image : Modérée au dehors, sagement résolue et prospère au dedans, telle devra être la politique suivie par la République française.
Contenu textuel de l'image : GEORGES LETELLIER.
droit d'utilisation : Licence Ouverte-Open Licence

Retour